19/06/19  par Olivier Scaglia

* Programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile

 

Depuis un peu plus d’un an, à Quimper, le Prahda est installé dans un ancien hôtel à bas coût, à l’entrée de la ville. Soixante-dix réfugiés y sont accueillis. Majoritairement des demandeurs d’asile tombant sous le coup du règlement européen dit de « règlements de Dublin », aux côtés d’une vingtaine de demandeurs d’asile « classiques ». 
Un arrêté daté du 13 mai 2019 figurant dans le recueil des actes de la préfecture du Finistère révèle qu’un nouveau Prahda est mis en place à Guipavas, dans les murs d’un ancien hôtel et dont la gestion est également confiée à la société Adoma (Société d’économie mixte détenue par des acteurs publics dont l’État ; anciennement Sonacotra). Un lieu ayant pour le moment un statut plus proche d’un centre d’hébergement d’urgence.
Le nouvel agrément permet en réalité au préfet du Finistère d’aussi discrètement que réglementairement concentrer les demandeurs d’asile « dublinés » à proximité d’un centre de détention et d’un aéroport.
Selon nos informations, la cinquantaine de demandeurs d’asile quimpérois concernés devait se voir notifier leur déménagement à Guipavas ce mercredi après-midi, puisque leur installation aux portes de l’aéroport serait programmée sous une semaine. Dans le même temps, les demandeurs d’asile « classiques » de Guipavas devraient arriver à Quimper.

Le règlement Dublin freine la bonne intégration des exilés et déséquilibre l’accueil en Europe

« Nous observons que le règlement Dublin, qui oblige les demandeurs d’asile à déposer leur demande dans le premier pays d’entrée en Europe, n’a que des effets négatifs, tant pour les étrangers que pour les pays européens », s’insurge la Ligue des Droits de l’Homme-Bretagne. « Forcer les exilés à déposer leur demande dans un pays qu’ils n’ont pas choisi n’a aucun sens. Cela freine leur bonne intégration et déséquilibre l’accueil en Europe. Quand un étranger choisit la France, il le fait pour des raisons objectives : parce qu’il parle la langue, parce qu’il y a des contacts, voire de la famille, donc des possibilités d’intégration ». D’analyser : « Actuellement tous les pays européens sont entrés dans une course sordide : ce sera à celui qui expulsera plus que les autres chez son voisin européen. Cela ne change rien au nombre de demandeurs d’asile en Europe, ça les force juste à aller dans un pays qu’ils n’ont pas choisi ».

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Deux exemples quimpérois

 

Plusieurs associations comme la Ligue des Droits de l’Homme sont mobilisées de longue date face au Règlement Dublin dans la capitale de Cornouaille. David Torondel, président de la LDH-Quimper, éclaire la position à la lumière de deux exemples : « La préfecture a programmé l’expulsion vers l’Espagne d’un demandeur d’asile guinéen. Pourtant ses deux parents sont en France, avec un statut de réfugié. Il a trois petites sœurs nées en France et un frère dont la demande d’asile est en cours en France aussi ». Le militant cite l’autre exemple « d’un demandeur d’asile ayant une compagne réfugiée statutaire en France, enceinte. Leur bébé devrait naître en septembre. La préfecture programme quand même son expulsion vers l’Espagne ». 
Le règlement Dublin le précise pourtant : « Conformément à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, le respect de la vie familiale devrait être une considération primordiale pour les États membres lors de l’application du présent règlement ». Le président de la LDH-Quimper conclut, par conséquent, que « La préfecture est dans une démarche de non-respect de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ». 
« Nous avons maintes fois sollicité la préfecture afin de remettre en place des réunions régulières entre les acteurs associatifs et leurs services, afin d’évoquer les situations humanitaires qui nous semblent les plus inquiétantes. Toutes nos sollicitations sont restées lettre morte ».